Faites comme chez vous

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c'est recevant !

jeudi 28 août 2008

Un lancement qui m'a donné des ailes !

Je ne regrette pas une seconde mon déplacement de Eastman jusqu’au Cercle à Québec pour le Lancement d’Enthéos. Marc et moi avons beaucoup aimé l’ambiance, cette énergie impalpable englobant les énergies de chacun. Il y avait une belle fébrilité, rien de faussement blasé, comme il arrive parfois dans ces 5 à 7 à saveur culturelle.

Faut dire que l’auteure, Julie Gravel-Richard *** ne dégage pas ce genre d’ondes. C’est une femme sérieuse, profonde, concentrée. Elle prend tout à cœur, c’est évident, et elle dégage franchise et droiture. On se tient loin des faux-semblants ici ! Avant de nous lire un extrait d’Enthéos, les premières pages en fait, elle nous a décortiqué le titre et c’est là que je regrette de ne pas avoir eu une mini-enregistreuse à la portée du sac à main ! Julie en a décortiqué le sens, je me souviens qu’il y a un lien avec l’enthousiasme et l’inspiration. L’inspiration viendrait du souffle de Dieu en nous. Je l’ai compris ainsi mais peut-être que l’auteure nous laissera un message pour nous éclairer.

Éric Simard, son directeur littéraire (un homme que j’ai trouvé pétillant et vrai), en a profité pour nous parler de sa propre implication, intense et intéressante avec une « élève » aussi ouverte pour un professeur (J.G.R. est professeur d’histoire au Cegep).

J’ai supposé que cette collaboration se nourrit un de l’autre. Je pressens que plus l'auteur a confiance en soi, moins il se sent personnellement attaqué par la portée des remarques. Une réelle ouverture permet d’accepter les remises en question pour pousser le travail d’écriture à son maximum. C’est essentiel car sinon pourquoi consulter un directeur littéraire si c’est pour faire fi de tout ce qu’il suggère ! En fréquentant le blogue de Julie Gravel-Richard j'ai suivi chaque étape du remaniement du manuscrit de concert avec Éric Simard. J’étais déjà étonnée de cette manière de procéder. Il me semblait que cette implication de la part du directeur littéraire n’était pas d’usage courant. Une légère supervision, oui, mais pas ce travail d’accompagnement en plusieurs étapes.

J’ai eu une réponse à ce sujet hier soir et c’est Adeline Corrèze de chez Septentrion qui nous l’a gentiment donnée. Je dis « nous » car étaient présentes « Jules se livre » et Virge que j’ai eu le bonheur de rencontrer en personnes ;-). Pour la collection « Hamac », j’ai appris que c’est une volonté ferme de Septentrion d’accompagner les auteurs à ce point dans leur démarche. Cela se faisait beaucoup auparavant et avec le temps, cet art de faire s’est perdu. On le reprend. À mon avis, c’est heureux. J’y crois beaucoup. Il y a certains romans qui se trouvent entre nos mains et qui, franchement, auraient eu avantage à être fouillés. Il y aurait matière à élever la qualité d’un cran, deux crans … trois … quatre …

Encore plus de raisons d’être titillée par l'envie de lire « Enthéos » ! Si je me garde de le faire, c’est que je désire le lire en solo, il faut donc que je termine les trois lectures que je mène de front ; Champagne, Big Bang, Une divine plaisanterie.

De me connecter à cette fébrilité passionnée autour de la chose littéraire, déployée dans la chaleur humaine, m’a donné des ailes ; pour le plaisir de savoir que ça existe !

*** Pour la version de l'auteure sur l'événement, consultez son Jour J directement ici.

mardi 26 août 2008

Le froid modifie la trajectoire des poissons - Pierre Szalowski

Bon, ramassons nos idées, il est temps de parler de ce sympathique roman, sans prétention aucune. Pour le résumer beaucoup, on pourrait dire que LA tempête de verglas de 1998 sort le voisinage d’un enfant de 10 ans de sa trajectoire de vie, comme le froid fait dévier la trajectoire des poissons. Une ligne en caractère gras sera tirée entre le « avant » et le « après » la tempête. Et vive la tempête, pourrait-on conclure !

Le cœur de l’histoire part justement du cœur d’un enfant de 10 ans, jamais nommé, qui découvre que ses parents veulent et vont se séparer. Il implore le ciel et qu’est-ce que le ciel fera pour l’aider ? Une tempête de verglas. Eh oui, ni plus, ni moins !

Plusieurs histoires de plusieurs personnes se chevauchent, se réunissent sous la chaleur d’une ampoule allumée ou d’un cœur qui bat la chamade de l’amour universel. C’est d’ailleurs de la nature humaine à son meilleur dont il est question, ce qui en fait une histoire très optimiste. Bon enfant même. Quelques séances de défoulement sur le divan du psychanalyste qui l’héberge pendant la panne d’électricité transformeront un père amer et vulgaire en homme posé et aimant. Il y a des histoires qui sont venues me chercher un peu plus, comme celle du Russe qui fait des expériences avec les poissons en compagnie d'une belle voisine danseuse nue. Cela vient peut-être de l’idée que l’amour qui entre en trombe dans une vie vient la bouleverser aussi sûrement qu’une tempête de verglas.

Mais je vous parle des voix mitoyennes à la voix centrale, celle du bambin qui pleure la séparation de ses parents et quand je dis « pleure » c’est au sens littéral. Plusieurs personnes pleurent dans cette histoire, je le note car je dois avouer que c’est un détail qui m’a énervé à la fin. Je ne percevais pas vraiment d’émotion sous le pleur, faut-il dire, peut-être parce que le ton voulant rester léger, naviguait à la surface des événements et des personnes.

Il est devenu clair pour moi que Pierre Szalowski voulait arriver à ses fins : démontrer combien les enfants sont des pions que l’on bouge sans y prendre garde lors d'un divorce. C’est peut-être moi qui suis trop sensible à l’idée de me faire « vendre » une quelconque idée dans un roman, qu’elle soit très valable ou non, mais le tissu était cousu de gros fils blancs.

Malgré tout, cette histoire appelle à l’indulgence pour le baume heureux qu’elle pose sur les misères humaines, dès le départ, tout est en place pour que ça aille bien et ça se sent. En tout cas, moi, je l’ai senti comme l’on sent fleurir la fin heureuse d’une comédie romantique. J'ai quand même trouvé que la fin et ses dénouements heureux s'étirait en longueur. Cela m'a fait réaliser combien la nature humaine est ainsi faite qu'elle est captivé par le duel, l'opposition, le paradoxal, le nébuleux, le mystère quoi !

Tout bien considéré, je me dis qu'il fait bon de s’offrir de ces petites réconciliations avec la vie, non ? En autant que les attentes soient ajustées en conséquence d’un roman à laisser fondre sur la langue comme du tendre nougat au miel.

dimanche 24 août 2008

Une brève histoire du tracteur en Ukraine

Voilà une histoire abordée d’une manière des plus originales et je dirai heureusement parce que les questions pourraient se poser gravement ; Quoi faire avec un vieillard qui, après la mort de sa femme, perd la tête pour une femme qui a de grosses boules, dont il a lui-même défrayé le coût d’ailleurs, surtout quand ce vieillard est votre père ?! Doit-on laisser une personne âgée faire tout ce qu’elle a envie de faire avec le patrimoine familial parce qu’elle a l’âge de raison ? Les deux filles de ce père Ukrainien, (un génie fou ou un fou génial ?) vont se les poser et y répondre promptement : Non ! On assiste donc au conciliabule de ces deux sœurs, diamétralement opposées dans leur conception de la vie, pour comploter dans le dos de Valentina, la profiteuse, celle qui désire la supposée richesse de leur père mais pas ce qui vient avec, la vieillesse.

Le ton et la structure du roman maintenant, parce que toute l’originalité vient de là. Le ton est mi-figue, mi-raisin et aussitôt que l’on pense qu’il est sérieux, on s’aperçoit que non, pas du tout. Il y a un humour, poussé dans les situations, et subtil par le ton. Les personnages ne sont pas des clowns, loin de là, ils se prennent tous au sérieux, même les plus risibles, dont le père et Valentina. Si on est chatouilleux sur la vulnérabilité des personnes âgées, sujet que l'on considère tabou, le ton pourrait paraître irrévérencieux tandis que pour les autres il sera carrément désopilant.

La structure du roman est très spéciale, on ne fait pas dans la banalité et le conformisme. Le dévoilement des personnages se fait par petits coups, par des situations loufoques, leur passé sera dévoilé doucement ouvrant une fenêtre sur leur drame présent.

Le fil conducteur n’a pas l’air d’être tenu solidement et puis, surprise, il l’est, ce qu’on réalise pleinement à la fin. La brève histoire du tracteur en Ukraine est le livre rédigé par le père et il nous le lit au fil du roman. On aime ou pas, disons que mon conjoint a plus aimé que moi.

Je dis un gros bravo à cette auteure d’une première œuvre pour avoir abordé avec intelligence et humour un sujet humain ; jusqu’où peut-on intervenir dans la vie de nos parents vulnérables parce que très âgées. Il aborde aussi le thème du jugement, car tout le monde se juge d'après les apparences dans cette histoire. J’ai bien aimé me promener sur le fil de rasoir de la drôlerie et de la gravité, c’est une expérience d’ambigüité très intéressante. Et moi qui ai pris soin de ma mère jusqu’à l’âge de 91 ans, de concert avec mon frère avec qui je ne voulais pas m’entendre (il a bien fallu pourtant !), me fait dire que cette histoire en est une d’actualité, déjà présente pour certains et à venir pour tous !

À lire avec du recul, en se donnant la permission de rire de situations à ne pas étiqueter « sacrées » seulement parce que vécues par des personnes âgées.

vendredi 22 août 2008

Récolte gaspésienne

Nous quittons la Gaspésie demain, emportant mille souvenirs et une pochette d’agates. J’emporte aussi trois livres étampés lus :  Le froid modifie la trajectoire des poissons, Une brève histoire de tracteur en Ukraine et Sans cœur et sans reproche.

Je suis incapable de rédiger mes commentaires de lecture d’ici. Mes idées sont gelées, même par pareille chaleur. Ne désespérez pas, aussitôt revenue dans mon pays ombragé d’arbres et de courants frais, les idées devraient se réchauffer et, j’espère, se bousculer au portillon (est-ce que ça paraît que je supporte mal la chaleur ?)

En tout cas, ce fût de très belles vacances, dépaysantes, étourdissantes d’espace et d’air de mer.
À bientôt !

mardi 19 août 2008

Le temps se retient de passer

Du Café de la Vieille Usine à l'Anse-à-Beaufils (photo ci-contre), le temps se retient de passer, c'est ce que je lui ai commandé en fait. Il m'obéit au doigt et à l'oeil puisque la vitesse de connexion est si lente, si je compare à la vitesse intermédiaire de chez moi, que je n'ai pas le choix de "prendre" du temps. Prendre de mon temps pour vous écrire un mot, ça me fait un immense plaisir. Cela aurait été chose possible du Gîte La Rêvasse, seul hébergement de notre itinéraire qui offre ce service mais le soir, je reviens trop fourbue de vent, de soleil, de marche. Un peu courbaturée aussi de mes audacieuses positions sur des rochers à lire mon roman sur "Le froid modifie la trajectoire des poissons". Un livre sur les poissons devant la mer et ce n'était même pas planifié. Je l'achève d'ailleurs.

À la Vieille Usine, ici, les musiciens se préparent à la venue de Kevin Parent qui donnera deux spectacles demain, celui de 5 h 30 étant une supplémentaire. Ceux qui me suivaient l'année passée savent que c'était Plume Latraverse. J'essaie donc de me concentrer malgré la belle musique forte qui entre, veut ou veut pas, par mes oreilles. Bientôt, j'irai rejoindre le bruissement fort des vagues, elle est tout à côté qui m'attend. Marc aussi, malgré qu'il soit en si bonne compagnie ; ses agates, ses chères agates ! La récolte est assez bonne en considérant bien sûr qu'un chasseur d'agates n'en a jamais assez.

Demain, nous déménageons mais à Percé même. Nous irons sous un autre toit, un presbytère aménagé en Gîte, ce qui est de plus en plus courant. D'ailleurs, à Nouvelle, nous serons à l'Abri du clocher, un autre presbytère, et dans la chambre du Monseigneur s'il vous plaît ! Mais pour revenir à notre déménagement, ce n'est pas par caprice, on ne pouvait pas nous accommoder pour quatre nuits à La Rêvasse, et cela même en réservant deux mois à l'avance. Jeudi, nous quittons la pointe de la Gaspésie, nous dirigeant vers la Baie des Chaleurs, même si la chaleur semble s'être déplacée vers nous puisqu'aujourd'hui le survêtement n'est pas nécessaire. Les moins frileux osent même la trempette à la mer. Nous sommes extrêmement chanceux point de vue température lors de nos expéditions en Gaspésie. Le ciel nous aime et nous l'aimons.

Je suis sous la tutelle de ma pile qui se décharge progressivement, elle surveille le temps que je passe derrière un écran. Je suis sous haute surveillance et avant qu'elle me donne son ultimatum, je vous laisse pour mieux vous revenir avec plusieurs compte-rendus de lecture qui vont bientôt débouler.

Petite note : ce billet est parti en différé, c'est à dire du Gîte La Rêvasse tard le soir, la ligne Internet de la Vieille Usine n'était pas seulement lente mais avait d'importantes ratées rendant impossible de passer la barrière "temps".

samedi 16 août 2008

Un 15 en différé ... Comptez jusqu'à cent

Coucou !

Je trouve ça bien drôle de vous parler en ce moment et d'être en Gaspésie ! Nous avons laissé notre maison "La Jeanne" à des amis et nous sommes sur la route avec le but d'arriver à Petite Vallée à la Maison Lebreux et nous sustenter de leur fameuse bouillabaisse.

Au gré des branchements possibles, par exemple à Percé au gîte La Rêvasse cela devrait être possible de vous envoyer des commentaires de lecture. Ils vont donc se rédiger sur le bord de la mer, mon style va peut-être s'en trouver transformé, qui sait ! Je termine tout bientôt mes deux lectures en cours : Sans coeur et sans reproche et "Petite histoire du tracteur en Ukraine". Ensuite, j'entame "Le froid modifie la trajectoire des poissons" en espérant que ce titre n'est pas un pronostic et qu'il va faire chaud, étant certaine que le froid modifie la trajectoire des humains aussi ...

En attendant, il y a mon commentaire "Compte à rebours" de"Compter jusqu'à cent" de Mélanie Gélinas, la Recrue du mois d'août.
Ce roman ne peut se lire comme un roman, donc je ne peux rédiger mon commentaire comme un commentaire. Je dois tout de suite dissocier l’écriture du propos et pour moi c’est essentiel. En même temps que je l’écris, je me pose la question ; peut-on vraiment le faire ? Dans le but d’être mieux comprise, je vais répondre oui. Il y avait d’un côté cette écriture qui m’amenait sur des sentiers jamais empruntés, de l’audace dans la tournure, du mystère parce que de la profondeur et du symbolisme et un abandon total à l’instinct du mot. J’en mangeais d’un côté et j’en rageais de l’autre, contre la source de ces mots, contre cette douleur apaisée seulement parce qu’exposée, car sinon toujours aussi vive.

Un tête à tête avec la douleur, c’est étouffant. J’aurais aimé pouvoir me débattre et m’éloigner. Personne n’aime la douleur, en tout cas moi de celle-là, je n’en pouvais plus. Je prenais une dose à chaque soir et chaque soir le souvenir de la veille m’étreignait. L’auteure est si talentueuse qu’elle possède l’art de tenir le Lecteur prisonnier de sa toile tissée de maux où parfois passe de l’air, pas souvent, et seulement pour lui faire réaliser qu’il en manque. Une expérience que j’ai trouvée difficile, je l’avoue, malgré et à cause de la valeur de l’œuvre. Si l’écriture n’était pas aussi intense, impliquée, évocatrice, j’aurai pu me faufiler, me glisser par la bande.

Alors, j’ai souffert avec elle, ou avec Anaïs qui est « elle ».

Au risque de paraître superficiel en regard d’un propos aussi grave, j’ai beaucoup aimé le concept, chaque chapitre qui se compte jusqu’à cent et même le volume du roman, carré, que l’on appréhende pour le posséder entièrement. Le cent avait donc beaucoup d’importance puisque toute la question était d’y arriver. Avec le cent, il y avait la fin, il y avait le vide. Je ne l’ai pas vécu longtemps, ce vide, puisque la postface invite le Lecteur en deuil à poursuivre. J’y suis entrée pour me consoler et aussi par curiosité. J’en suis sortie très rapidement et j’aurais aimé plus rapidement encore. J’ai perçu cette analyse comme trop rapide pour moi et je préfère dans le cas d’une œuvre palpitante de vie de ne pas la soumettre à une autopsie, aussi savante soit-elle.

Je laisse à l’auteure les mots de la fin :

"Maintenant quand mes doigts se recroquevillent sur la plume, je suis en danger de mots. Je ne peux écrire que ma mort. Je suis condamnée à investir un bijou dont l’issue est un éternel achèvement, un recommencement perpétuel, une rechute inassouvie dont la finalité est le deuil d’un parfait équilibre. Or, le temps est venu de dire que ce soir-là, je ne devais pas mourir seule dans la neige. Je devais vivre ! L’écriture me garde en équilibre sur le seuil de la vie et de la mort. Alors il me faut écrire au Lecteur"
.

mardi 12 août 2008

La traversée de l'enfance



Le dernier Café littéraire auquel j’ai assisté dimanche sur la Terrasse de La Marjolaine s’annonçait sous le très inspirant titre de « La traversée de l’enfance ». Devant nous, des auteurs qui ont aussi traversé la délicate opération de passer de lecteur à écrivain puisqu’ils en étaient tous trois à leur première œuvre fictive.

Pierre Szalowski (Le froid modifie la trajectoire des poissons), Nicole Fontaine (Moi, j’avais pas l’habitude de naître) et Bruno Hébert (C’est pas moi, je le jure) ont tous les trois emprunté la voie de l’enfance pour exprimer leur monde imaginaire. Pourquoi cette option ? a été la première question de l’animateur, Antoine Tanguay, remplaçant à pied levé, Danièle Laurin. Trois personnes différentes, trois réponses différentes, et sûrement trois romans totalement différents. Bruno Hébert déclare que ce serait pour se cacher, on peut tout faire dire à un enfant, il n’y aura jamais d’erreur, tout est permis. Pour la liberté finalement. Madame Fontaine y trouve un effet consolant. Quand elle écrit au nom des adultes, la vie se colore de noir foncé, c’est extrêmement dramatique, sans appel. Tandis que les enfants, même si elle ne nie pas leur cruauté, ont dans leur cœur du rebondissement. Il y a de l’espoir. Madame Fontaine s’incarne dans l’enfant pour écrire, l’affirmation a fait bondir Bruno Hébert qui, lui, se dit incapable de fonctionner ainsi. Une sympathique discussion a suivi et une raison a été avancée : Bruno Hébert vivrait encore son état d’enfance ce qui lui aurait facilité la tâche pour faire parler Léon, son personnage de 10 ans. Pour Pierre Szalowski, il fallait trouver la voix juste de l’enfant, ne pas le rendre exagérément mature. Surtout ne pas en faire un adulte. Le choix d’un enfant comme voix narrative est, si j’ai bien compris, pour la force de frappe d’entendre directement le premier concerné du divorce de ses parents.

C’est pour dire combien l’enfant se tient près des parents puisque le divorce est un sujet commun aux trois oeuvres, qu’il soit seulement abordé ou fouillé.

Le public nombreux et extrêmement intéressé l’a démontré par une grande variété de questions et de remarques, certaines je dirais même osées, comme cette dame qui a presque chicané Bruno Hébert d’avoir accepté que «C’est pas moi, je le jure » soit transposé au cinéma en septembre (Philippe Falardeau). Ne vous en faites pas, il sait se défendre. De sa franchise provocante, il nourrit son personnage de marginal, se traitant de paresseux qui n’aime pas l’effort d’écrire. Je pense qu’aussitôt qu’il sent une étiquette lui coller à la peau, il tire sur elle pour la décoller. Ne prenez surtout pas ça au premier degré, empressez-vous plutôt de lire cette histoire avant de la voir au cinéma, c’est toujours mieux, paraît-il. Moi, en tout cas, c’est ce que je vais faire aussitôt que j’aurais terminé « Le froid modifie la trajectoire des poissons ».

« Moi, j’avais pas l’habitude de naître » est le seul que j’avais déjà lu et commenté : ici. Je ne me lasse pas de ce titre, cette déclaration spontanée de l’attachant Marius mis en vedette dans quelques nouvelles de ce recueil. Il sonne à mes oreilles d’adulte : « Moi, j’avais pas l’habitude d’être » Naître ou ne pas être. Il reflète autant la difficulté de naître que d’être.

lundi 11 août 2008

Visite au pays des écrivains





Ça y est, je commence à retrouver des informations avalées goulûment dans les Cafés littéraires. Elles sont évidemment filtrées par ma subjectivité mais une chose reste certaine, et pour celle-là je n’ai aucune doute, ces Cafés littéraires sont infiniment précieux pour les insatiables de curiosité que sont les lecteurs et les potentiels écrivains. Je me suis abreuvée à même leurs confidences données à flot, sans autre digue que celle du temps.

Mon opinion des écrivains s'est haussée d’un cran. Ils sont plus que des conteurs de voyages intérieurs, plus que des photographes d’idées, d’ambiance, de paysages panoramiques, ils sont des témoins qui n’ont pas le choix de transmettre. Leur nature est une impitoyable impératrice qui les pousse à le faire au risque, sinon, d’éclater de leurs trop-pleins d’images, d’inspirations, de réflexions. Ils ont tant à dire ! Une de leurs œuvres leur rend justice comme une parole figée parce qu’imprimée, au même titre que l’album de photos n’est pas le voyage lui-même, seulement ses traces. J’ai compris qu’un roman est la résultante d’un vécu foisonnant, de positions fermes, d’imaginations domptées, et quelques fois même par une discipline de tortionnaire. Ou par le doute ravageur. Ou par la peur qui ne doit pas paralyser mais stimuler, cette peur de ne jamais être à la hauteur de son monde intérieur.

Ce qui me fait l’avancer est d’avoir entendu Monique Proulx (Champagne) nous confier qu’elle écrit environ deux paragraphes par jour, qu’elle les redit dans sa tête pour les entendre dans cette perfection qu’elle a choisie pour eux, complètement soumise à la dictature des mots pour livrer une œuvre qui la satisfasse. Et Bruno Hébert (C’est pas moi, je le jure !) qui déclare sans vergogne qu’il n’a pas terminé son roman. À comprendre que nous avons une œuvre inachevée entre les mains. Si l’affirmation vous choque, voyez-y cette conscience douloureuse de l’idéaliste qui court sans cesse vers plus haut et plus beau. Dani Yvan Béchard m’a renversé ; huit années de sa vie offertes sur l’autel de Vandal Love. Une réflexion poussée si loin qu’elle sort par boulets de symbolismes, nous donnant une quantité telle de sens cachés sous chaque choix que l’histoire se lit suivant le niveau de conscience du lecteur à ce moment de sa vie. Comment ne pas avoir été étonné, dépassé, emporté par cet être si inspiré qu’il se surprend lui-même à chaque minute où il ouvre la bouche : Dany Laferrière. Il était en grande forme cet écrivain qui se prétend japonais pour en être un planétaire. Ses exposés éclatent en mini-explosions choc, nous donnent à réfléchir dans quantité de miroirs, et les images se reconnaissant entre elles, nous font éclater … de rire. La lucidité (ludique) de cet écrivain est étonnante et a rejoint celle de ces « Randonneurs du monde »* et ceux qui ont dû « Voyager de force »*. Ils nous ont tous amené plus loin que leurs propres pas. Le mot « paysage » qu’ils ont étiré dans tous ses sens, le mot voyage l’accompagnant de près pour ce qu’il entraîne de bouleversement des paysages, état indispensable pour détourner le regard de l'écrivain de l’arrière-fond des habitudes, mœurs et coutumes pour aller puiser au plus profond de lui avec le récipient de sa conscience.

J’espère que ce premier jet (évitant ainsi le débordement !) vous attisera suffisamment pour vous promettre le cadeau de la septième édition Des Correspondances d’Eastman.

* Café littéraire « Randonneurs du monde » : Monique Proulx, François Barcelo, Hugues Dionne, Deni Yvan Béchard – animation vive et intelligente par Ariane Émond
* Café littéraire « Voyager de force » : Naïm Kattan, Neil Bissoondath, Dany Laferrière, animation posée et ouverte par Danièle Bombardier – Porte-parole

samedi 9 août 2008

Les écrivains s'animent sous mes yeux

Je suis présentement submergée, et pas de pluie, ce qui fait un gros changement dans ma vie ! J’arrive de la causerie avec Monique Proulx avec comme point de départ « Champagne » sans en connaître le point d’arrivée. Avec une femme comme elle, de cette fermeté douce et cette richesse d’expérience d’écrivaine aboutie, il ne peut en être autrement. Pour l’instant, je n’en dis pas plus, je vais y revenir. Sinon, jemanquerais de temps pour recevoir et donnerais moins par la suite.

C’est un tel concentréd’informations sur les écrivains, et l’écriture, en peu de temps que les idées se chambardent pour se replacer dans un autre ordre avec le temps. Le Café littéraire d’hier « Les randonneurs du monde » m’a fait le même effet que la causerie de ce matin. Quatre écrivains : François Barcelo, l’impertinent pragmatique, Monique Proulx, un paysage panoramique, Dani Yvan Béchard (Vandal Love), le philosophe à la symbolique et Hugues Dionne (Au bout de l’humain : Essai autobiographique sur le chemin de Compostelle), un sociologue qui se prétend à la retraite, ces quatre personnalités intenses animées par Ariane Émond, les incitant à s'épancher plus qu’ils ne l’auraient imaginés, a réussi à les sortir de la gêne et du supplice de l’estrade pendant que se lit à haut de voix un extrait de leur œuvre.

J’y reviendrai, car je le répète si je veux avoir le temps d’écrire des lettres personnelles, et me nourrir d’autres Café littéraires, je dois survoler. Il y a aussi, jeudi, le spectacle littéraire « Quai no 5 », une exultation de mots poétiques, un concentré « d’uni vers » la musique des mots. Un public très l’écoute qui a nourrit la prestation. Je vous en reparle car j’aimerais bien nommer les poètes à l’honneur (aucun « programme » et rapidement révélé à la fin).

Pour ceux qui ont suivi l’affaire de la dédicace de « Sans cœur et sans reproche », j’ai osé la présenter à Monique Proulx qui a tout de suite reconnu son écriture. Elle a fouillé sa mémoire, c’était tout probablement sa propriétaire mais pas question d'en jurer. Sa calligraphie a changé et j’ai pu le constater car elle a dédicacé "Champagne" :

Pour Venise en Eastman
Qui rayonne de la
beauté aquatique du monde
Amicalement
Monique Proulx – le 9 août 2008

jeudi 7 août 2008

Bonjour les entrevues !

Aimez-vous les entrevues ? Moi, j’aime ces « entrer voir » quelqu’un afin de mieux se connaître. Il y a d’excellentes entrevues et pour cela, c'est un peu comme la relation de couple, ça dépend des deux, autant de l’intervieweur que l’interviewé. J’en ai trois à vous offrir.

Les deux premières vont à tout seigneur, tout honneur : Mélanie Gélinas, notre Recrue du mois. Quand on dit en profondeur, eh bien, vous en aurez là un exemple patent et pétant de vérité. J’espère que vous serez curieux, et plus grande sera votre curiosité et plus grande sera votre satisfaction. C’est ici pour la première (deux parties) menée par Catherine Voyer-Léger et ici pour la deuxième de Caroline Verstaen


J’en ai une autre, en provenance direct du Québec, une « Made In Québec », un blogue que l’on vient à l’instant d’apporter à mon attention. L’interviewé est Ginette Lachance, rédactrice, réviseure et auteure, et pour résumer l’entrevue, je clamerai un tonitruant « Et pour l’amour de notre langue ». C’est ici et l’entrevue est menée par Jean-Luc Doumont.

* * *

Moi qui aime m’attarder au sens des mots, je trouve curieux que le verbe entrevoir signifie quasiment le contraire de l’entrevue ; Voir à demi, indistinctement ou trop rapidement. Ce n’est certes pas ça que l’on désire en entrevue !

Autre fait tout aussi frappant si on s’y arrête, les trois entrevues ci-dessus se sont déroulées sans que les personnes ne se soient vues … même pas entrevues !

mercredi 6 août 2008

Mon actualité

C’est la première fois que j’ose utiliser le mot “actualité”. Il fait peur à la blogueuse que je suis. Je l’approche timidement, car je lui projette plein d’obligations sérieuses, une promesse d’engagement que je ne saurais tenir, l’actualité étant trop vaste, trop complexe à couvrir. Je l’ai donc amadouée d’un « mon ».
Elle est très pointue mon actualité, elle se résume à peu de choses en égard à la grande. J’espère que vous lèverez vos verres, j’ai enfin mon « Champagne » entre les mains, une journée à l’avance. Ce n’est pas de trop, mon objectif étant d’en avoir lu une bonne partie au moment où je vais me présenter (fièrement j’espère !) devant son auteure, Monique Proulx. Ma décision est prise, et j’espère que je vais m’y tenir, j’aimerais qu’elle me dédicace son petit-dernier, introduction idéale pour lui présenter la dédicace du petit-premier. Dans l’espoir de la faire parler un peu, en dehors de ses belles histoires.
Oups… mon actualité est que présentement, à l’instant où je vous parle, un rayon de soleil a réussi à se faufiler à travers la Déesse Diluvienne. Je n’ai même pas eu le temps de terminer ma phrase qu’il s’en était allé … était-ce un mirage ?
Toujours est-il que je ne crois pas que le chapiteau que j’ai vu hier, bien planté à côté de l'Église d'Eastman ait été un mirage. Je sens le bruissement des préparations, la tension est tangible, serons-nous prêts à recevoir la grande visite ? Et surtout, combien attendons-nous de visite !? Aurons-nous la collaboration de la Déesse Diluvienne ? Aurons-nous suffisamment de para – sol, pluie, tonnerre ?
J'en profite pour vous rappeller que j’assisterai au spectacle qui souligne l’ouverture de l’événement (du 7 au 10 août), j’embarquerai au Quai no 5 avec Tristan Malavoy, Ivy, Mara Tremblay. En si bonne compagnie, le voyage promet de nous faire planer au-dessus de la température.
Mon autre actualité est que c’est la journée « Sherbrooke » ce qui inclut les emplettes et le cinéma. On dit tellement bien de « La graine et le mulet » qu'il est devenu incontournable, ce visionnement sera suivi de la récréation « Bienvenue aux Ch’tis » en partie pour vérifier si ce qui fait rire le Français fait autant rire le Québécois.
Mais je ne vous ai pas encore parlé de mon actualité la plus prenante, la plus saisissante, la plus dégoutante et elle est très talentueusement représentée ci-haut par la caricature d’André-Philippe Côté du Soleil *
*** Attention, pas de confusion possible, le « Soleil » est un journal !!!

dimanche 3 août 2008

Le livre et son histoire

Bon, ça y est, j’ai remis les pieds à la très modeste bibliothèque d’Eastman, ouverte une demi-journée, le samedi, et une presqu’une journée (heures brisées) le mercredi. J’ai exploré, le cœur palpitant de trouver mes titres, parce que bien sûr arrivée avec « ma liste d’épicerie ». Finalement, je n’ai trouvé aucun des titres que je cherchais mais j’en ai trouvé une pile que je ne cherchais pas.

À l’heure de la fermeture, une pile sur le bras, j’arrive au comptoir et la bénévole, avec un air aussi désolé qu'attendri, me souffle un « trois seulement ». Trois seulement !? Devant mon air à moi, déconfit et alarmé, elle m’en a concédé un de plus. Ce qu’une bénévole peut avoir de pouvoir parfois !

En tout cas, d’avoir laissé des trésors derrière moi m’oblige à remettre les pieds dans cette bibliothèque qui ne sent pas tant le moisis finalement. Mais pour s’y trouver, ça, c’est une autre histoire ! Et en plus, pour faire exprès, l’auteur élu parmi tous est toujours flanqué au plancher, je dois me plier en deux devant lui. Et faire des courbettes, ce n’est vraiment pas mon genre !

Mais voilà le dessert (j’adore les desserts !), j'ai mis la main sur une absolue antiquité, d’ailleurs je ne l’ai pas laissée (ma main) et je le regrette. Au moins, pour prendre connaissance de la date d’édition de ce livre fragile, relié avec une couverture aux couleurs élimées, pour ne pas dire effacées, le « Alexandre Chenevert » de Gabrielle Roy. Les feuilles étaient très épaisses et d’une couleur parchemin foncé jamais vue de ma vie. Ça sentait les années 60. La prochaine fois, en l'ouvrant, je lui demanderai son âge exact.

Mon quatuor maintenant, parce que c’est parmi cette sélection qu’une autre surprise m’attendait. Comme « Champagne » était réservé par cinq personnes avant moi (à raison de 3 semaines chacune + les retards), j’ai opté pour le seul livre qu’il y avait de Monique Proulx « Sans cœur et sans reproche » un recueil de 15 nouvelles. À la maison, je l’ouvre et à la page de garde, j’y découvre ceci :

Février 1986

Pour Louise,

dont la sensibilité et le cœur

Sont sans reproche,

Avec mon affectueuse

Amitié,

Monique

J’ai de la difficulté à le croire ; serait-ce vraiment une dédicace de l’auteure ? Ou plutôt d'une quelconque Monique ? Il n’y aurait qu’elle pour me répondre mais la délicatesse oblige-t-elle de ne pas le lui demander ? Cela peut-il être blessant d'apprendre qu’une petite parcelle d’intimité passe entre toutes les mains ? Ou bien cela la plongera dans de désagréables souvenirs ; cette « Louise » n'est peut-être plus son amie ou pire elle est morte et c'est ainsi qu'elle l'apprend ? Vous allez me dire que je lis trop de romans mais le livre (l'objet), et son histoire me fascine.

Mes autres bouquins sont restés fermer sur leur secret, trop jeunes peut-être « C’est la faute au bonheur » Arlette Fortin (Prix Robert Cliche en 2001). Le cahier noir de Michel Tremblay – premier de trois cahier (Noir, Rouge, Bleu), publié une année après l’autre : la saga de Céline, semblerait-il. Et puis, pour une réconciliation sûre avec Marie Laberge « La Cérémonie des Anges ».

Je dois maintenant m’habituer à l’idée de ne pas posséder ces livres. Cependant, personne ne m'empêchera de posséder l’histoire !