Faites comme chez vous

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c'est recevant !

jeudi 29 octobre 2009

Un monde mort comme la lune - Michel Jean

Allons-y avec la quatrième de couverture : Jean-Nicholas Legendre, grand reporter pour la télévision québécoise se rend en Haïti pour y suivre la trace des narcotrafiquants colombiens et enquête sur leurs liens avec les gangs de rue de Montréal et le régime du président haïtien. Et qui a écrit cette histoire ? Le journaliste Michel Jean, co-animateur de l’émission J.E. qui a couvert plusieurs sujets dont la guerre en Iraq et la crise en Haïti. C’est son premier roman.

Je fais le parallèle entre l’histoire et l’auteur parce que, justement, c’est au départ ce qui m’a dérangé. Dès les premières pages, nous sommes à Port-au-Prince sous le régime de Jean-Bertrand Aristide, et ce mixte de la réalité (utilisant les vrais noms) avec la fiction m’a empêché de plonger. Comprenez-moi, ce n’est pas la sempiternelle question du vécu ou non, c’est plutôt cette impression de suivre un reportage, aussi palpitant soit-il, qui m'a tenu dans un état de lectrice de journaux, sollicitant mon côté rationnel. Et pourquoi pas, puisque c’est tout probablement un choix de Michel Jean ? À ce compte-là, j’avoue que c’est une affaire de goût ...

La deuxième partie est venue me chercher un peu plus. À son retour au Québec, à la sortie du vidéo choc qu’il a tourné au risque de sa vie, le journaliste Legendre subit des secousses sismiques dans sa vie personnelle et professionnelle. Au travers des dédales de cette sensationnelle affaire de trafic de drogues, j’ai aimé que l’auteur fasse une place de choix à son amour infini pour sa femme et sa fille, autant qu’il a fait état de son attirance pour Bia, une haïtienne énigmatique, prostituée de luxe. Je me suis un peu rapproché du journaliste, mais pas au point d’être fusionnel, loin de là. Pourquoi cette distance qui a perdurée jusqu’à la fin ? Comme dans la vie, c’est une question d’atomes crochus, pourquoi prendre à cœur les déboires d’une personne et seulement compatir avec ceux d’une autre ? Pourtant, quand le personnage principal prend autant de place, ça peut se voir comme une invitation de s'en rapprocher, surtout quand celui-ci partage généreusement ses émotions et ses sentiments. Les plus fortement décrits sont l’attirance sexuelle et le rebond vital de la vengeance. Laisser palpiter son coeur sous la pulsion sexuelle fait circuler le courant de vie en nos veines, la vengeance encore plus. Par la rage dans laquelle la vengeance puise. J’ai plus ou moins embarqué dans cette rage folle, au même titre que j’ai loupé des rendez-vous avec certaines circonstances très hasardeuses, comme l’accident de Bia. C’est beaucoup en mettre sur le dos du destin.

Je crois que j’aurais préféré que l’auteur s’oublie, s’efface derrière son personnage de journaliste. Je ne l’ai pas senti assez emporté par son histoire. Pourtant l’habileté de raconter est présente et certaines envolées confirment un amour infini des mots. Par exemple, les descriptions de Montréal sous la neige m’ont frappée par leur justesse.

J’ai apprécié l’épisode « rédemption », c'est que personnellement, je crois à ce genre de phénomène un peu inexplicable. Le parallèle de similitudes d'énergie entre ses deux « familles femmes » est audacieux, loin du cliché, mais j'ai dû fournir un effort pour y croire. Il y avait là de la matière (de la belle matière d’ailleurs !) à en faire tout un roman, mais diluée dans une spectaculaire enquête à puissantes retombées mondiales, le côté surprenant pourrait prendre le dessus pour certains.

Une fois la couverture et la poussière retombée, j’ose conclure qu’il apparait difficile de vivre à fond son élan de romancier en se tenant si près de son vécu.

Un monde mort comme la lune – Michel Jean. Libre Expression. 254 p.

mardi 27 octobre 2009

Dany Laferrière remporte un prix littéraire de 10,000 $

Dany Laferrière a remporté le Grand prix littéraire international du Festival Metropolis bleu 2010, d'une valeur de 10 000 $. L'auteur d'origine haïtienne recevra le prix au cours de la 12e édition du Festival littéraire international de Montréal Metropolis bleu, qui se tiendra du 21 au 25 avril. Les plus récentes oeuvres de Dany Laferrière incluent Je suis un écrivain japonais et L'énigme du retour, qui est en lice pour le prix Médicis et le prix Fémina 2009. Parmi les derniers lauréats du Grand prix littéraire international Metropolis Bleu, on compte A.S. Byatt (2009), Daniel Pennac (2008), Margaret Atwood (2007) et Michel Tremblay (2006).
La Presse Canadienne

Sûrement un homme heureux en ce moment ! De mon côté, je suis de plus en plus inconfortable avec le fait que je ne l'ai pas encore lu ! Je vais commencer par son petit dernier. Je l'achète pas plus tard que demain.

Je ne peux m’empêcher d’être contente pour lui. J’ai réalisé aux Correspondances d’Eastman combien c’est un homme collaborateur, courtois, bref, il a une belle attitude. Et il travaille fort, vous avouerez. Et on ne peut pas l'accuser d'être banal ! Et ses yeux pétillent plus que jamais !

Voyons voir, 10,000 $ ... c’est l’équivalent de combien de romans vendus ? ...
J’ai fait le calcul, juste pour le plaisir ... 4,000 romans L’Énigme du retour ! Je lui souhaite en plus ces 4,000 romans vendus mais ... j’ai comme des doutes.

Recevez toutes mes félicitations monsieur Laferrière !

Photo tirée du site : www.air.villagillet.net

dimanche 25 octobre 2009

Butinons le butin

C’est mon vrac. Je m’en ennuyais, vous aussi j’espère ! Ça me laisse de la latitude et j’ai besoin parfois de sortir de l’encadrement des commentaires de lecture et aller folâtrer un peu partout qui, je le réalise, tourne toujours autour de l’humain.

L’inconnu
Assez souvent, le premier réflexe devant l’inconnu ; regard suspicieux, petit pas en oblique, quand ce n’est pas le braquage. Un réflexe des plus humains. Prenez Le discours sur la tombe de l’idiot, de Julie Mazzieri, en lice pour le GG, j’étais moins attirée pour la seule raison que je ne la connaissais pas. Dans le domaine littéraire, on s’entend que ne pas connaître veut surtout dire « ne pas en avoir entendu parler ». Eh bien, ça y est, j’en ai maintenant entendue parler ! Une bonne samaritaine m’a aiguillée : Julie Mazzieri aurait suivi son cours littéraire avec Yvon Rivard, est une Montréalaise « exilée » en Corse par amour depuis quelques années. La messagère, digne de confiance dans le sens qu’elle n’a aucun intérêt à promouvoir cette auteure, m’a révélé que cette lecture a été son grand coup de cœur toutes catégories confondues : « C’est un roman sobre et fort, lucide, à la langue extrêmement maîtrisée, d’une grande intelligence et tout en finesse, une très belle découverte ». Ça m’a donné le goût de me jeter dans les bras de l’inconnu ! Cette lecture devient incontournable pour moi. On s'en reparle !

Andrée Ferretti récipiendaire du prix Alfred-Desrochers 2009 – Tiré Le Libraire
(Marsi et moi y étions ! En fait, nous étions à proximité des trois écrivaines en lice, voyant l’espoir miroiter dans leurs yeux).

Andrée Ferretti n’est pas repartie les mains vides du dernier Salon du livre de l’Estrie. L’écrivaine a remporté le prix Alfred-Desrochers 2009 remis par l’Association des auteures et auteurs des Cantons-de-l’Est, grâce à son roman Bénédicte sous enquête (VLB éditeur). Meilleure chance la prochaine fois pour Michèle Plomer (HKPQ, Marchand de feuilles) et July Giguère (Rouge presque noire, Hexagone). « Le roman d'Andrée Ferretti a été un coup de cœur pour tous les membres du jury », a souligné le président du jury, Antoine Sirois. Ce texte raconte la découverte d’un ancien manuscrit dans une maison tricentenaire de Neuville. S’ensuivent questionnement, recherches et surprises.

L’écrivain et le rejet
L’écrivain abouti, ou potentiel, a à vivre avec le refus. Quand un écrivain en lice n'est pas choisi pour un Prix, il a à gérer une forme de rejet. Je l’apparente à celui de la démarche pour offrir le premier manuscrit. Presque tout écrivain, y compris les maintenant célèbres, n’ont pas été publié dès leur premier envoi. On leur a retourné leur espoir accompagné d'une lettre circulaire. En France, par exemple, 1 manuscrit se publie sur les 1,000 reçus de la manière la plus anodine qui soit, la poste. Imaginez les piles et les piles de manuscrits !

Il y a plusieurs histoires sur le sujet, j’ai retenu celles-ci (article du Nouvel Obs.com)

Sorj Chalandon reçoit un mot écrit d'une belle encre bleue: «Dans ce texte, il y a tout et il n'y a rien du tout. Il faut travailler, travailler, travailler. Il faut que l'enfant pose la plume et que l'adulte la prenne.» Cette réponse est signée Dominique Fernandez. Le futur académicien est membre du comité de lecture de Grasset. Pendant vingt ans, Chalandon ne retouche pas son manuscrit. Quand il le renvoie, profondément remanié, en 2005, il est accepté. Par Grasset.

Qui se douterait, par exemple, que Vincent Message, 26 ans, l'un des plus jeunes primo-romanciers de cette rentrée, a envoyé son premier manuscrit au Seuil il y a dix ans déjà? Depuis l'âge de 16 ans, il a bénéficié auprès de Louis Gardel d'une sorte d'accompagnement éditorial qui lui a permis de mûrir ... Et de finalement être publié !

Je serai drôlement curieuse d’apprendre la proportion au Québec : un manuscrit sur 100, 200, 300 ? De quelques éditeurs, j’entends surtout que les bons manuscrits manquent à l’appel (À lire certains premiers romans, je serai porté à le croire). Je me suis plu à imaginer un bouquin qui rassemblerait l’expérience du « premier manuscrit » de nos auteurs et quelques éditeurs qui se prononcent. Comme disait ma mère « ça tomberait dans ma talle ! »

Je vous laisse sur ce dessin qui m'a bien fait rire ...

Source:www.blogapart.info

mercredi 21 octobre 2009

Mégot Mégot Petite Mitaine - Johanne Alice Côté

Voulez-vous me voir patiner ... sans glace ? Eh bien, écoutez cette tentative de commentaire de lecture. Premièrement, j’aurais eu un soupçon à votre place, j’ai terminé ce recueil depuis bientôt deux semaines et je n’avais pas encore publié de commentaire. Il y a « cogiter et cogiter ! ». En fait, j’ai sauté sur tous les prétextes qui passaient à la file pour éloigner l’heure de cette confrontation avec moi-même, au nez de vous qui me lisez.

Le fait avouable est que je me souviens seulement de trois nouvelles sur les dix. Et encore ! Ce soir, ma rigueur aux abois, j’en ai repris huit, traversant les paragraphes en diagonale pour me remémorer sans relire le mot à mot. J'avais l'impression d'une première fois. L’idée étant de cerner si c’est ma mémoire qu'on doit traiter de défaillante, j’ai testé chaque titre avec Marc, lui demandant s’il se souvenait de l’action. Avec certains efforts, il en a retracé six : « Les tomates pousseront d’elles-mêmes », « Paragraphe pour toi, mon amour » « Exposition orale », « Grâce », « Un brownie ! Yé ! » « Mégot Mégot Petite mitaine ». Et à moi, l’amnésique, il me les racontait... et je restais dans le rêvé avec cette même sensation qu’à l’éveil du sommeil quand flotte encore autour de soi de la brume de nébuleuse. Ce moment particulier entre la terre du sommeil et la mer de l’éveil où l’on s’essaie à attraper les faits et les personnes avant qu’ils ne s’estompent. Une vapeur céleste. Voilà ce à quoi me font penser ces histoires éthérées. On y accoste pourtant, pour de vrai, au chevet de moribonds, on s’y recueille comme se recueillent les êtres qui errent en esprit vagabond, bondissant d’un endroit à l’autre sans déplacement de corps. On se leurre. On sonde et on se songe. On s’évanouit. On capture sa pensée ou on l’envoie à l’autre, sortant à peine de soi pour le rejoindre là où il n’est pas encore. Si j’ai une excuse d’avoir déserté ma conscience pendant ma lecture se serait que cette évasion hors de mon corps a servi à mieux lire cette prose qui se décompose.

C'est seulement à la nouvelle « Un brownie ! Yé ! » que mon âme a réitéré son corps pour entendre les pleurs lancinants de cet enfant gâté, jusqu’à la pourriture, qui torture sa mère manipulable comme une boule de pâte à gâteau.

Ces dix nouvelles m’ont fait traverser la frontière du temps au-delà de mon espace de vie. J’ai vécu ailleurs et n’en suis tout simplement pas revenue avec mon bagage de mots, de cette vadrouille, je suis revenue bredouille. Ces nouvelles m’ont kidnappé l’esprit, je dois m’y résigner, comme vous devrez le faire de ne pas m’entendre aussi clairement qu’à l’accoutumée.

Oyé ! Oyé ! Que ceux et celles qui les ont lues sans s'évader qu'ils se lèvent et s’expriment, en comptant que Johanne Alice Côté leur en serait gré. Je vous laisse sur les mots d'une mère qui agonise :

"Si tu n'as pas peur de me regarder, tu repères sans doute une lisière de blanc sous les cils, et peut-être un croissant de pupille décolorée. Mes yeux ne s'ouvrent plus mais ne se ferment pas complètement. Ils captent juste assez de lumière pour recréer dans mon cerveau les formes qui rappellent la vie. Derrière mes yeux, il n'y a déjà que des fantômes."

("Me brûle, me brûlera" - p. 44)

lundi 19 octobre 2009

Prix littéraire du GG en CHIFFRES

Les finalistes du Prix littéraire du Gouverneur Général en CHIFFRES :

: Auteurs, illustrateurs et traducteurs sont âgés entre 27 à 78 ans
: Au moins 7 finalistes ont moins de 35 ans;
: 70 ouvrages sont en lice.
: 1541 livres admissibles ont été soumis : : 657 en français et 884 en anglais
: 38 des 75 finalistes le sont pour une première fois
: 3 des finalistes sont autochtones.
: 14 comités (7 en français et 7 en anglais) pour sélectionner les finalistes
: Les œuvres ont été parcourues entre le 1er juillet 2008 et le 30 juin 2009 pour les livres de langue française et entre le 1er septembre 2008 et le 30 septembre 2009 pour ceux de langue anglaise
: Une somme de 1000 $ est remise à tous les finalistes non lauréats
: Les lauréats recevront une bourse de 25 000 $, ainsi qu’un exemplaire spécialement relié de leur œuvre primée.
: L’éditeur de chaque ouvrage gagnant recevra une subvention de 3000 $ pour ses activités promotionnelles.
: La valeur totale des Prix littéraires s’élève à environ 450 000 $
: Les noms des lauréats seront dévoilés, mardi 17 novembre à 10 h à la Grande Bibliothèque
: Michaëlle Jean, gouverneure générale du Canada remettra les Prix littéraires aux lauréats de 2009 le jeudi 26 novembre à 18 h à Rideau Hall
: 50e anniversaire de l’engagement du Conseil des Arts envers les Prix littéraires du Gouverneur général

FINALISTES DE LANGUE FRANÇAISE : Romans et nouvelles

Jean-François Beauchemin
, Sainte-Anne-des-Lacs
Cette année s’envole ma jeunesse - Québec Amérique
Une expérience intime avec des mots qui, par leur incarnation réelle et l’espace qu’ils occupent, confèrent une substance très forte à l’histoire. Grâce à cette « musique formidablement humaine » dont parle l’auteur, l’interaction avec le lecteur est facilitée. La langue est belle; ancrée dans le corps, elle nous remue profondément.

Nadine Bismuth, Montréal
Êtes-vous mariée à un psychopathe? - Boréal
On savait l’auteure nouvelliste accomplie. Elle le prouve une fois de plus avec ce recueil de récits parfois impressionnistes, parfois psychologiques, parfois carrément satiriques. Le monde de
Nadine Bismuth n’est pas le vase clos du Plateau Mont-Royal d’une certaine génération. Il nous englobe tous. L’habileté de son écriture nous charme.

Dominique Fortier, Montréal
Du bon usage des étoiles * - Alto
L’auteure a le mérite de traiter avec originalité un sujet connu : l’expédition de Franklin en Arctique. Le point de vue qu’elle nous donne est rafraîchissant, surprenant. Sa langue est limpide, nuancée, d’une lecture aisée. Ce n’est pas un roman historique, c’est tout bonnement un roman. Qui va rester.

Julie Mazzieri, Velone-Orneto (France) [originaire du Québec],
Le discours sur la tombe de l’idiot - Éditions José Corti
Julie Mazzieri nous propose une savante manipulation des genres grâce à une écriture experte et un souffle contrôlé. Son texte, aux allures de roman noir, est une formidable incursion dans le labyrinthe des passions où se perdent des personnages aveuglés par les mesquineries quotidiennes.

Aki Shimazaki, Montréal
Zakuro - Leméac
Dans ce roman palpitant et dépouillé à la perfection, Aki Shimazaki ouvre une fenêtre sur un épisode douloureux de l’histoire. L’écriture, économe et au fini marmoréen, offre une intrigue au déroulement implacable d’où sourd, comme par magie, une émotion crue. Le

* L’équipe de rédaction du site «La Recrue» a élu coup de coeur Le Bon usage des étoiles pour l’année 2008-2009.

vendredi 16 octobre 2009

Entrevue de Carine à Marsi

1 Q : Je suis toujours curieuse de savoir comment un auteur élabore son projet, la genèse même de l'oeuvre... Avant d'entreprendre le dessin de tes planches, avais-tu déjà une idée figée de l'histoire de bout en bout ou les éléments du scénario sont venus au fur et à mesure à la conception des planches?
R. : Non, en fait, tout ce qui m’importait était de construire une histoire simple qui ne demanderait pas des tonnes de références à gauche et droite. Ce besoin m’était d’abord venu du fait des quelques scénarii que j’avais déjà pondus et qui m’étaient apparus terriblement compliqués. Ensuite, cette histoire qui va d’un point A à un point B s’est imposée.

2 Q. : En fait, à l'image d'un écrivain, avais-tu déjà un plan élaboré de ton histoire avec les différentes phases et l'évolution des choses ou as-tu été transporté au fur et à mesure laissant les personnages et les scènes "prendre vie" au gré de ton humeur?
R. : Pour ce qui est de la trame narrative, il est primordial, pour moi, d’avoir un concept clair dès le départ avec une fin déjà déterminée. Je préfère élaborer mon travail sans avoir à improviser, du moins, le moins possible. Il m’est toutefois arrivé en cours d’exécution de réajuster un peu le tir sur certains pans de l’histoire.

3 Q. : Je sais qu'entre le début du projet, c'est à dire le dessin de la première vignette et l'édition de l'album il s'est passé 3 années (ou 2 .. j'ai un doute maintenant...) mais depuis combien de temps avais-tu l'envie de dessiner cette bande dessinée?
R. : Durée du projet : 2 années et demie... Je dirais que l’envie de faire une bande dessinée remonte à 1999. Mais, comme je te l’ai écrit, j’ai eu à pondre bien des essais avant de parvenir à ce projet. Pour ce qui est de l’idée même du goûteur et de sa cavale, elle date d’environ une année avant la mise en branle du projet.

4 Q. : Je présume qu'il y a eu des périodes plus florissantes que d'autres mais, en moyenne, combien de temps consacrais-tu à l'élaboration de ton oeuvre?
R. : Environ huit heures par jour et, le plus possible, cinq jours par semaine. Ce qui n’empêche pas que j’ai du parfois relâcher l’accélérateur. Les circonstances m’ont permis de m’y mettre ainsi à plein temps.

5 Q. : Quand aimais-tu le plus dessiner?
R. : Certainement lors de la conception au plomb de l’album. D’abord, j’avais l’ivresse du nouveau contrat avec les éditeurs qui me stimulait à souhait et puis c’est sans doute là la période la plus riche au niveau de la création.

6 Q. : Est-ce que tes personnages sont nés avec le projet ou existaient-ils déjà dans une vie avant le projet?
R. : Pour ce qui est de Coco Météore et de Pouette, ils existaient déjà depuis au moins un scénario que j’avais écrit auparavant sans pour autant y donner suite. Pour sa part, Coco Météore est celui qui possède les racines les plus sinueuses. Il est né d’un personnage que je trimbale depuis des années et qui est en fait une salamandre. Coco Météore lui-même était une salamandre au départ et s’est vu transmuté en cheval-chimère au fur et à mesure de l’évolution de l’histoire. Ce qui m’a mené à un tel changement est l’idée d’associer cavalier et monture dans un rapport de dominé-dominant légèrement tordu. Pouette est le cavalier et prend donc charge de fouetter les sens de Coco Météore mais c’est à peu près là son seul rôle (À part celui de siffler). Coco Météore est donc la tête pensante du duo. Et de confier à la monture la tâche de gouverner m’apparaissait très amusant. Voilà pourquoi il est passé de salamandre à « cheval ». Pouette, quant à lui, trouve son inspiration dans un chat que l’on a eu et qui avait un peu ce caractère « petite lune intense ».

7 Q. : Y'en a t-il qui sont nés exclusivement pour cet album?
R. : Mis à part Coco Météore et Pouette, la majeure partie. Sauf peut-être aussi Zéphéon, le sommelier du Père Poule, qui apparaissait déjà dans le premier scénario laissé en plan sous les traits d’un disciple de Saint-François d’Assise.

8 Q. : Est-ce le nombre de planches était déterminé à l'avance (je ne connais pas très bien le monde des BD et je n'ai jamais remarqué si il y avait un standard en terme de nombre de pages)?
R. : En effet, une grande partie des bandes dessinées sur le marché comptent 48 pages mais c’est de moins en moins vrai. Aujourd’hui, il se fait des BD jusqu’à 200 pages et + quoique la norme tourne autour des 48 habituelles.
A. : Si oui, as-tu du ajouter ou supprimer des planches pour arriver au compte?
R. : De mon côté, j’avais pondu une BD qui, à l’origine, comportait 48 pages effectivement. Cependant j’ai eu à rallonger le tout pour des raisons que j’explique plus bas.

9 Q. : Comment as-tu fait la topographie? Était-ce fait sur papier à la main ou avec un ordinateur?
R. : D’abord, je trace sur papier, au crayon plomb l’ensemble de l’album puis je fais tout l’encrage sur carton à l’aide d’une plume feutre 0.1. Ensuite, je scanne chaque page et fais la coloration par ordinateur sur Photoshop (Aidé de deux amis et de Venise ). Pour ce qui est de la typographie, elle a été exécutée à l’ordi par l’éditeur, Martin Brault ainsi que par Stéphane Ulrich, l’infographe de La Pastèque.

10 Q. : Comment se passe la soumission de ton projet à un éditeur?
R. : J’ai, en tout premier lieu, envoyé une maquette de l’album qui comprenait les dix premières pages tracées (dont la page 1 colorée ) ainsi que toute l’histoire esquissée sous forme de « tumbnails » c’est-à-dire de petits croquis. Le scénario aussi accompagnait cet envoi. Le surlendemain, les éditeurs me contactaient.
A. : Quelles sont les corrections à apporter, s’il y en a? B. Le projet est-il pris dans sa globalité ou t'a-t-on demandé de retoucher des parties?
R. : Le projet a été effectivement adopté sans changements majeurs. Cependant, comme je te l’ai mentionné, l’album comportait au départ 48 pages. C’est sous la recommandation de Martin et Fred, les éditeurs de La Pastèque que j’ai rajouté quelques pages afin de préciser certains points qui demandaient que l’on s’y attarde (explication du Sifflet royal, développement autour du combat final ). De plus, de légers détails ont exigé quelques modifications. Pour ce qui est du texte, la correction m’aura obligée, encore là, à modifier sensiblement certaines tournures de phrase ou mots inappropriés, sans parler des fautes d’orthographe ou omissions.

11 Q. : Pendant l'élaboration de ton album, as-tu demandé à du monde de te lire/critiquer ou as-tu attendu l'extrême fin pour le faire?
R. : Dès le départ, j’ai voulu avoir l’opinion de mon entourage. Ce qui n’est par ailleurs pas toujours simple. En effet, bien que j’essayais le plus possible d’offrir le maximum d’information à mes pré-lecteurs, ce n’est que vers la toute fin du processus qu’il devient plus aisé de bien soupeser l’ensemble de l’histoire et de son efficacité. Et c’est à ce moment bien sûr qu’il devient plus difficile de faire marche arrière. J’estime qu’avec l’expérience je saurai tirer le maximum de ces occasions afin d’obtenir l’avis juste et de savoir en prendre avantage.

12 Q. : Quelles ont été/sont tes sources d'inspiration?
R. : Hergé surtout et bien d’autres. La part manifeste faite à l’imaginaire dans les émissions télé de mon enfance. Ma formation en design graphique y transparait aussi, je crois.

13 Q. : Est-ce que tu penses faire une suite avec ce même univers?
R. : Il y a une suite de prévue dans ma tête. Ainsi, la fin de l’histoire ouvre sur de possibles autres aventures. Déjà, j’ai entamé un second scénario qui en est à ses tout débuts. Mais, la parution d’un deuxième tome dépendra du succès de Miam Miam Fléau. A. Ou penses-tu en changer?
R. : Je travaille aussi sur d’autres projets. Ceux-ci s’adresseront davantage à un public adulte. Par contre, si Miam Miam Fléau se devait de ne pas aller au-delà du premier album, certainement que je tenterais encore quelque chose vers la jeunesse ou carrément vers l’enfance.

14 Q. : Comment penses-tu gérer l'attente des personnes d'un autre projet de ta part? Te sens-tu stressé par la chose?
R. : Pour ainsi dire, non. Par contre, comme tu le constates, je tâte du côté de la Bd adulte. Est-ce parce que je préfère ne soutenir aucune attente ? Bien sûr, si Miam Miam Fléau devait s’engager dans une suite, je crois que oui, j’aurais un certain stress vis-à-vis ceux qui auront apprécié l’album.

15 Q. : Comment vis-tu les premières critiques de ton bébé?
R. : Je suis un anxieux et comme tout bon anxieux c’est d’avantage l’absence de commentaire qui me turlupine. Par contre, lorsqu’il y a critique, je réagis fort probablement comme bien des gens ; j’ai le cœur qui bat la chamade jusqu’à ce que l’on m’ait rendu compte de l’avis du critique, puis je suis une boule d’émotion pendant quelque temps. Ensuite, je deviens analyste du dit avis. Heureusement, la réception de l’album est, ma foi, assez positive.

16 Q. : Était-ce ta première tentative d’édition d'un album ou as-tu déjà dessiné d'autres BD qui n'ont pas été montré au grand public?
R. : Non, là, c’est ma toute première BD.

17 Q. : Te rends-tu compte que ton bébé est devenu immortel? T'arrive t-il d'imaginer comment il va évoluer dans le temps et savoir que dans de nombreuses années ton album sera encore lu par bon nombre de personnes. Quel est ton sentiment par rapport à cet accomplissement?
R. : J’en suis fier, sans aucun doute. Je crois que ce qui me satisfait le plus est la persévérance dont j’ai fait preuve. Car, je te le dis, pondre cet album n’a pas été du tout cuit. Pour ce qui est de son évolution, je constate que Miam Miam Fléau est un album intemporel et donc qui devrait bien tenir les années. Il ne réfère à aucune époque précise et ne véhicule pour ainsi dire aucune idéologie autre que l’acceptation du libre imaginaire. Par exemple, on dirait de lui qu’il a été écrit il y a trente ans et ce serait envisageable.

Merci à toi ! Tes excellentes questions m’ont aidé à situer d’avantage tout ce travail.

* * *
La photo n'est pas celle de l'entrevue que vous venez de lire qui, elle, s'est déroulée par courriel entre Carine, une amie, et Marsi. Je sais, je fais tout pour vous mêler ... mais pas éternellement ! La photo représente donc une autre entrevue d'environ deux minutes entre Anick Moulin et Marsi qui a eu lieu hier au Salon du livre de l'Estrie pour l'émission Sortir.

jeudi 15 octobre 2009

La Louée - Françoise Bouffière

Sept visions* trônent à La Recrue en ce 15 du mois. En passant, nouveauté à La Recrue, un questionnaire à l'auteur. Bonne manière de connaître Françoise Bouffière qui s'y dévoile bellement. Des réponses captivantes et bien tournées. Ça commence bien !
*Sainte-Marie-des-Fossés
* Nouveaux atours pour un mal connu
* Prendre son destin en main ...
* "Savonner, frotter, rincer, étendre, ne pas penser ..."
* Un roman contemporain sur un drame du passé
* Parfum d'autrefois


La chair est centre, l'âme est flamme (Victor Hugo)

J’ai toute de suite embarquée, à pieds joints, dans cette histoire. Remarquez, je dis « histoire », pas roman, pas livre. J’avais une seule crainte, celle que l’on me retire brusquement mon plaisir. J’espérais que la constance du ton persiste, que l’histoire continue de couler aisément sous mes yeux avides. J’ai tellement aimé que cela m’a fait me demander ; pourquoi ai-je tant cette impression que l’on m’a raconté une histoire quant en fait, j’imagine, c’est la prétention de chaque romancier ?

C’est difficile à dire, encore plus à écrire. Je vais tenter une comparaison pour m’expliquer. Vous rencontrez des personnes qui, dans la vie, vous racontent des histoires, ne serait-ce que des anecdotes, il y en a qui, tout de suite, captent votre attention, vous embarquent. Ces conteurs, les vrais de vrais, ont un ton que j’appelle détaché. Ils entretiennent une distance avec leur histoire, tout en l’a possédant. J’ai cette impression qu’ils la regardent de biais, avec un certain recul, créant une distance avec leur émotivité, mais pas trop. Parce que s’ils s’en tenaient trop loin, ils en refroidiraient les ardeurs. Ils savent tenir un équilibre. Pour l’atteindre, il faut aussi, je crois, beaucoup aimer son histoire et éprouver un sincère plaisir à la raconter.

Voilà ce que j’ai senti en lisant La Louée. Et qui plus est, elle est diablement bien menée, cette histoire, pas linéaire du tout. Le personnage principal a juste le bon dosage d’innocence pour que l’on sympathise de tout cœur. On y croit, elle est vraie, attirante mais ne prend pas la place de l’histoire et ses sujets qui m’ont enchantés. Un de ces sujets, pourtant éculé, le contraste entre les riches de la haute et les pauvres campagnards ignares. Le dénuement si grand qui ne reste pas d’autre choix que celui d’offrir son corps dans un but difficilement plus digne : nourrir un bébé. Consentir à prêter sa poitrine laitière et recevoir un beau magot en échange. Bien sûr, l’idée de l’esclavage ne décollait pas de ma tête, je revoyais ces marchés où l’homme blanc allait acheter son « animal » humain le mieux portant pour le placer à son service.

L’injustice, l’innocence trompée, les illusions envolées, la maternité en marchandage, les mères amères, la chamade amoureuse trompeuse, la domesticité, la solidarité et la brave fierté des femmes, beaucoup de chair tendre recouvre l’ossature du roman La Louée. Et j’en prendrais bien une enfilade de cette nature !

lundi 12 octobre 2009

Vous aimez Leonard Cohen ?

Bonjour tout le monde ! C’est l’Action de Grâces aujourd’hui et à la Babillarde, je parle de cette fête que j’aime beaucoup. D’ailleurs, je me suis fait prendre à mon jeu (sans même savoir à quoi je joue !) puisque je devais y révéler que Marsi passera à la télévision, jeudi à 18 h 30 à l’émission Sortir de la Radio-Canada/Estrie. J’ai aucune idée si les gens qui ont des satellites, des câbles, des hélicoptères ... oups, je ne suis pas à la Babillarde ici, pourront le capter en direct du Salon du livre de l’Estrie mais ce que je peux cependant vous affirmer, c’est qu’un caméraman est venu le filmer à l’œuvre à sa table à dessin.

Mais assez parler de ma vedette « maison », je saute à une vedette internationale qui nous appartient un peu par la racine ; Leonard Cohen, l’écrivain. Le poète. Vous l’aimez ... beaucoup, passionnément, douloureusement ? Vous devez être une femme alors ... non ? C’est mon frère qui affirme catégoriquement (bien sûr, je le soupçonne d’être atrocement jaloux) que ce sont les femmes qui sont folles de lui. Ceux qui veulent le contredire, allez-y fort, j’aime bien obstiner mon avocat de frère !

J’ai un appel de textes (ou de fleurs !) pour ses admiratrices ou admirateurs. Je vous transmets le communiqué de presse signé Éric Simard, mot pour mot, car j’ai rien à y redire, rien à y rajouter, sinon que j’aimerais être assez inspirée pour envoyer un texte. Et Marc une image (art graphique). Et vous ?

OBJET : Des fleurs pour Cohen

Dès l’automne 2010, une fois par an, la collection Hamac fera paraître
un recueil de textes inédits de différents auteurs à qui nous
demanderons de s’inspirer de l’univers d’un artiste d’ici ou d’ailleurs.

Le premier recueil sera consacré à Leonard Cohen. Pourquoi Cohen ?
Tout simplement parce que nous l’aimons. Nous croyons que la carrière
musicale de celui-ci éclipse trop souvent sa vaste contribution au
paysage littéraire pancanadien. Leonard Cohen nous appartient
collectivement, au même titre qu’Anne Hébert, que Gabrielle Roy, que
Gilles Vigneault ou que Mordecai Richler. Nous croyons qu’il est grand
temps que les auteurs d’ici s’approprient son œuvre et le célèbrent
enfin comme poète, comme romancier, comme parolier.

Ce projet nous trottait en tête depuis un moment déjà, mais n’ayant
que tout récemment obtenu l’approbation de l’équipe de Monsieur Cohen,
ce n’est qu’aujourd’hui que nous nous lançons hardiment dans l’aventure.

Si l’œuvre de Leonard Cohen vous inspire, vous pouvez dès maintenant
vous mettre à la tâche et nous soumettre vos textes par la suite. Ils
peuvent prendre l’une des quatre formes suivantes : nouvelle, poésie,
théâtre ou art graphique (dimensions 5" x 7,5"). Il n’y a aucune
contrainte de mots en autant que la longueur soit raisonnable.

La date limite a été fixée au 31 janvier 2010. Nous n’acceptons que les textes imprimés envoyés par la poste en une seule copie à l’adresse suivante :
Les éditions du Septentrion
Att. : Éric Simard
1300, av. Maguire
Québec (Québec) G1T 1Z3

Nous avons très hâte de découvrir vos propositions.

Éric Simard

mercredi 7 octobre 2009

Entrevue avec Nicolas Dickner

Je vous laisse mon petit mode d’emploi ! Il y a des questions non répondues, ce ne sont pas des oublis. Nicolas Dickner a choisi de ne pas y répondre, soit qu’elles exigeaient des pages de développement, soit qu’il ne trouvait rien d’intelligent à y répondre. J’ai cru intéressant de laisser les questions non répondues parce qu'on peut y projeter une option ou l'autre. J’ai ajouté des titres à mes (longues) questions, je venais de terminer ma lecture de Tarmac et ses 97 titres. Ça m’a amusé et j’imagine que j’ai souhaité amuser N.D. À vous de voir si, après cette lecture, vous connaîtrez un peu mieux cette énigmatique personne. Vous remarquerez, les créateurs qui baignent dans un fort imaginaire sont difficiles à cerner. Et c'est tant mieux. Nous ne voulons justement pas les cerner, juste les aimer.

S’offrir du luxe

Si vous pouviez vous achetez deux heures par jour à quoi serviraient-elles ?
Lire, prendre des photos dans le quartier, mariner dans mon bain, écumer une pinte au comptoir d’un bar.

L’entrepreneurship
Quelles tactiques pourraient être mises en place afin que le livre objet ne perde pas trop de vitesse en égard au livre électronique ?

Oups … supprimer !
En processus d’écriture, comment réalisez-vous que vous êtes sur une fausse piste ? Et si cela ne vous arrive jamais, quelles sont les terribles tentations du net pour vous emprisonner dans sa toile ?
À force de lire et relire un texte, les passages superflus finissent généralement par sauter aux yeux.

Cotons la perfection
Rêvons un écrivain parfait et distribuons-lui des notes pour qu’il soit 100% performant :

95% Sens de l’observation
50% Bagage de connaissance

80% Imagination

30% Vécu

90% Maîtrise de sa langue


Qualités rajoutées par Nicolas Dickner :
80% Mémoire
60% Maîtrise du langage narratif

100% Persistance


Se boucher les oreilles
Quelle question détestez-vous vous faire poser ?

Le bruit qui vous horripile quand vous travaillez ?
Un enfant qui pleure. Impossible de faire quoi que ce soit lorsqu’un enfant pleure dans une maison. Homo sapiens est neurologiquement conçu pour devenir dysfonctionnel, dans ces cas-là.

Le commentaire le plus insipide sur les écrivains ? Sur la littérature québécoise ?

Le futur de la progéniture
Votre fils veut suivre vos traces. Quels sont les trois conseils que vous lui donnez par ordre d’importance ?
Je lui dirais de beaucoup lire, de beaucoup écrire, de beaucoup jeter – et, surtout, de ne pas devenir écrivain. Ce dernier conseil est de loin le plus important. Il m’a toujours semblé crucial de devenir écrivain envers et contre l’avis de quelqu’un.

Lequel avez-vous le moins suivi jusqu’à date ?
Le dernier, naturellement.

Et si vous étiez …
Phrase à Compléter. Exemple : Et si vous étiez un écrivain … vous seriez original.

Un éditeur ... je ferais de petits livres photocopiés et brochés tout de travers, que je laisserais traîner dans le métro.

Un organisateur de Salon du livre ... j’organiserais un salon du livre en plein air, au mois de juillet.

Un critique littéraire …… je serais inquiet.

Un professeur de français …… je serais fatigué.

Un sportif …… je serais coureur de fond.

Au secours !
Comment se sort-on de la banalité ?
En se mettant à la place du lecteur

Sans quarantaine
Quelle est la qualité que vous aimeriez aussi contagieuse que le virus A ?

Aimantez-vous
Commentez et/ou mettez par ordre d’attirance. Vous aimeriez écrire :
Un scénario de film
Un roman pour la jeunesse
Une pièce de théâtre
Un album de bande dessinée
Un essai
Une bio (rajoutez de qui)

Un roman pour la jeunesse (disons pour adolescents / jeunes adultes)
Un scénario de film

Un album de bande dessinée (texte ET dessins)

Un essai

Une bio (l’idée me plaît et, pourtant, je n’arrive pas à trouver un sujet)

Une pièce de théâtre


Le souffle de l’alpiniste
Avant vos quarante ans, y a-t-il un mini mont Everest que vous désirez atteindre dans votre vie personnelle ou professionnelle ?
Mon troisième roman.

Le masque qui rit, le masque qui pleure
Que diriez-vous à vos fans pour tempérer leurs ardeurs ?
Que diriez-vous à vos détracteurs pour les amadouer ?

Je voudrais remercier ...
Vous recevez un Prix hommage pour l’ensemble de votre œuvre et vous avez oublié votre mémo dans la poche du veston que vous avez décidé de ne pas porter. Qui risquez-vous d’oublier ? Qui risquez-vous de mentionner en premier ?
Je m’assurerai en tout cas de remercier mon éditeur et ma famille. Ils sont les deux piliers d’un écrivain, à la fois du côté public et du côté privé.

lundi 5 octobre 2009

Nous ne vieillirons pas - Patrick Nicol

Je ne sais pas si cela vous arrive parfois d’avoir de la difficulté à associer le résumé du quatrième de couverture avec l’histoire que vous avez lue. Eh bien, ça m’arrive ici. J’avais hâte de lire cette plaquette (petit format de 133 p.) puisque j’ai gardé un excellent souvenir de « La Notaire ». Mes attentes étaient un peu plus hautes que de partir à neuf, est-ce cela qui m’a rendu cette lecture ardue, à moins que ce soit le sujet, en autant qu’il y ait un sujet de vraiment cerné. C’est un professeur de littérature, et aussi écrivain, qui se raconte et relate à plusieurs reprises les propos d’un professeur qu’il l’a jadis marqué. Décrivant aussi quelques autres étudiants, le plus marqué et le plus marquant étant le Tragédien.

S’il faut trouver un thème, ce serait le temps qui passe. Un gros rhume le lui fait suspendre, ce temps, prétexte comme un autre pour s’accorder une pause, séjournant dans son sous-sol sur le sofa-lit, il en profite pour fouiller son passé et lire, et nous faire lire, quelques lettres du Professeur. Il nous invite généreusement à partager ses pensées qui tournent principalement autour d’Hélène, sa conjointe et son ado. Il nous les fait observer et on sent sa vague inquiétude, celle d’être ennuyant. Disons que je comprends son inquiétude, avoir ce prof écrivain comme conjoint, ou père, je ne manquerais pas de m’ennuyer. Je dirais même plus, et c’est ce qui me désole, je me suis ennuyé à cette lecture. Si j’avais réussi à chevaucher la vague nostalgique, admirant l’époque de Beau Dommage (quelques strophes de chansons sont à l’honneur) mais il faut être drôlement dynamique pour m’amener à jouir de la vue de sa vie par le rétroviseur. Et si encore, j’avais détecté des signes que ce soit pour se donner un élan vers l’avenir.

Patrick Nicol a cru bien faire en nous conviant à tourner les pages de son album à souvenir mais s’il y a quelque chose, j’ai préféré son présent même si assez routinier pour ne pas dire vide. Ce sont tout de même les passages qui m’ont le plus intéressés. D’ailleurs, aux premières pages, j’étais animée d’espoir car j’aime cette manière qu’a Patrick Nicol de me surprendre par la tournure de ses phrases. Mais cette histoire présentée comme un travail de rapiéçage m’a laissé sur la ligne.

En aucun cas, je renie cet auteur, je le prends comme un accident de parcours. Je vous invite à lire l'article de Mathieu Petit, chef de pupitre du Voir/Estrie, où l'auteur s'exprime et apporte un éclairage très différent du mien.

Nous ne vieillirons pas, Patrick Nicol, Leméac, 133 p.

Nota Bene : Je n'ai pas trouvé d'illustration de la couverture du roman pour la photo, vous découvrirez donc l'auteur.

vendredi 2 octobre 2009

L'Annedda, L'arbre de vie

Je donne la parole à un collaborateur spécial, qu’il nous parle de L’Annedda, L’arbre de vie de Jacques Mathieu, livre qu’il a savouré à petites doses, histoire d’assimiler les vertus de chaque feuille. Ça tombe bien (je ne parle plus des feuilles !) qu’il vous envoie un billet de son cru, ça me permettra d’en pondre un à la Babillarde sur le lancement à la librairie GGC, et bien plus encore. À la Babillarde, il y a toujours du plus, c’est l’art de s’étendre sur les détails, et de cancaner un bon coup. Pourquoi ? Parce que ça fait du bien et surtout parce que plus de gens que l’on pense aime cancaner !

Sur ce, je la lui laisse cette parole, savourez-la, c’est rare qu’il la prend ici, ce MARSI.

Des Racines oubliées ----- Marc Simard

La petite histoire de la Grande, de celle qui nous bonifie de ces épopées difficiles, est souvent la pierre angulaire devenue indispensable mais oubliée même par le plus savant de tous. Ce que Jacques Mathieu nous permet de redécouvrir dans L’Annedda – L’Arbre de Vie c’est bien une partie perdue d’un magnifique usage sinon tombé dans l’oubli, du moins très certainement trompé par les innombrables versions et revirements du monde ancien.

Les peuples qui nous ont tous précédés en ces terres, les amérindiens, avaient une connaissance particulière des éléments. Ils savaient où puiser un bien-être essentiel en ces lieux qu’ils avaient baptisés et habités. D’eux, les explorateurs ont soutiré quelques franches leçons propres à soigner, voire à guérir les équipages puis les colonisateurs. L’Annedda, d’abord un conifère assurément, fut sans doute, de ces remèdes, le plus miraculeux. Amenées en ce Royaume de France, ses graines y furent plantées puis, malgré sa grandeur et l’attrait que ses rejetons exercèrent sur certains, il fut remisé dans les gloires silencieuses des cabinets de curiosités et des livres doctes.

Les Cahiers du Septentrion nous offrent avec cet ouvrage une enquête. Spécialiste d’histoire de la Nouvelle-France et des mémoires collectives, Jacques Mathieu débusque les allusions, les détails au semblant anodin pour en venir à profiler à travers les écrits des érudits botanistes de l’époque jusqu’à nos jours l’identité claire de l’Annedda et son impact sur notre temps. Un suspens ? Oui. Pour les férus d’histoire des sciences et les amoureux de ce que la nature peut sacrifier de plus beau à l’humanité. L’Annedda – L’Arbre de Vie sera d’abord un livre de chevet puis un aide-mémoire incontournable. Et comme je le clame partout, des suites de cette lecture, je ne cesse désormais d’embrasser les arbres.