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mercredi 16 septembre 2015

La chaleur avant midi de Mylène Durand

On entre dans cette histoire comme dans une bulle chaude et un peu étouffante. J’ai instantanément senti la lourdeur sur ma peau de lectrice. Il est tout à fait normal qu’il fasse chaud, nous sommes au Costa Rica où l’on retrouve Clarissa, une Québécoise oeuvrant comme femme de chambre dans un hôtel achalandé. Elle n’est pas une femme de chambre ordinaire, elle possède des parts dans l’hôtel. De ce lieu de transit pour touristes, elle a fait son home. Elle y séjourne depuis son départ du Québec, voici quelques années. Si on la sent si familière avec la forêt tropicale, la mer, les autres propriétaires de la station balnéaire, c’est qu’elle voue une tendre affection pour son environnement et pour son genre de vie. Elle s’y est même fait un amoureux, le guide et moniteur de planches.

L’arrivée d’une jeune femme Québécoise, Éloïse, va venir bouleverser le semblant d’équilibre que Clarissa s’était forgée autour d’elle et en elle. Éloïse est atteinte d’une maladie sournoise et Clarissa est aimantée par cette femme silencieuse qui est alitée. Elle ressent le besoin irrépressible d’en prendre soin, de mieux la connaître. De l’identifier. Elle la confond avec ses souvenirs en provenance du Québec et la culpabilité vient entrelacer leurs liens.

La vie dans cette station balnéaire est décrite avec tant de réalisme que l’on sent continuellement sur nos épaules le poids de la chaleur. J’ai aimé découvrir la forêt tropicale, l’explorer, en entendre les sons, les cris, les craquements inquiétants. J’ai aimé habiter ce lieu. Il est intéressant de vivre le contraste entre le monde insouciant des visiteurs, que je vois comme une scène, et en coulisses, la ronde routinière des employés qui exécutent leur rôle.

Plus on avance, plus Mylène Durand creuse les relations entre les personnages, les points d’interrogation surgissent, se densifient. Le mystère empreint de mysticisme épaissit l’air, pourtant déjà lourd. Les relations entre les divers personnages s’intensifient : entre les deux jeunes femmes, entre Clarissa et son amoureux, entre Clarissa et un des enfants des propriétaires, s’ajoute une vieille femme qui lance des imprécations. Des intrigues amoureuses viendront mêler les fils de l’intrigue et le lecteur tentera de se frayer un sentier dans cette forêt enchevêtrée de branches, pour y voir plus clair. Au centre du lieu, un volcan règne et pour se donner des frissons, les touristes viennent voir le brassage de son cœur bouillant.

J’ai pris un grand plaisir à baigner dans ce roman d’ambiance opaque au style subtilement suggestif. Il est rare que soit mise de l’avant à ce point une ambiance, suffisamment pour que les intrigues nous paraissent naturellement mystérieuses. Nous avançons dans un banc de brouillard.

Un roman à lire, et pourquoi pas en plein hiver pour se réchauffer la couenne (!), pour l’ambiance et les relations entre les personnages, pour le style enveloppant et le lieu si bien planté.

2 commentaires:

Danielle Voisard a dit...

Tu as le tour de nous mettre en appétit!

anne des ocreries a dit...

Ah bin là, tu me donnes envie !