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dimanche 25 octobre 2015

La déesse des mouches à feu de Geneviève Pettersen

Il n'y a pas que le titre qui fesse, le résumé aussi, et même la dédicace que m'a écrite l’auteure :  «  Des histoires de petites crisses, de skidoos qui vont vite et de bataille épique derrière le centre d’achats ».

Le franc-parler québécois, sans censure, sans gants blancs, sans mots à « 1,000 piastres », voici La déesse des mouches à feu, malgré un titre aux allures poétiques. S’il y a de la poésie dans cet ouvrage, c’est involontaire et je dirais que c’est surtout décelable « après » l’avoir vécu, peut-être pour le côté excessif tragico-comique. Car lorsque l’on vit l’adolescence, et Catherine la vit la pédale poussée au maximum, tout est si intensément vécu qu’il s’en dégage plutôt des relents sérieusement dramatiques.  

Faut dire, à sa décharge, que tout arrive en même temps. La vie se serait consulté pour concocter l’adolescence la plus ardue possible qu’elle n’aurait pas faite autrement, ne serait-ce qu’avec des parents qui divorcent. Mais des parents où l’histoire d’amour ne semble pas finie. On est loin de la sérénité ici. C’est la guerre douce ou hostile et en silence chez la fille à l’égard de sa mère qu’elle trouve cruelle à l’égard de son naïf de père. Il est question de clans et de tranchées, de prendre partie dans cette histoire qui concerne pourtant que les parents.

Sous l’œil impitoyable de Catherine, qui commence à se prendre pour un adulte, les parents sont sots ou ils ont tort sur toute la ligne. On connait cette rengaine chez les ados, à la différence près que cette fois, on croit Catherine. La force de sa voix retentit avec des accents criants de vérité. Je me suis même surprise à remercier le ciel d’avoir eu une mère plutôt potable, si je la compare aux parents de Catherine, particulièrement son père aussi immature qu'un enfant.

Quand on y regarde de près, c’est le tour de passe-passe de cette histoire, les parents se transforment en enfants, par leur chicane, et l’enfant tente de se transformer en adulte. Mais un instant, pas en adulte responsable qui pèse chacune de ses décisions mais en adulte étourdi par toutes les possibilités qui s'offrent tout à coup. Une ado se retrouvant seule devant sa vie à quatorze ans, à cause de la surveillance allégée des parents, veut goûter aux fruits défendus de la vie mais tous dans la même fin de semaine !  

Jamais la voix de Catherine ne va défaillir, elle gardera le même ton jusqu’au dernier mot. Jamais le lecteur ne se dira, je ne la reconnais pas. C’est la force de ce roman ; la vérité du personnage qui résonne fortement dans des lignes dialoguées. Elle dialogue avec elle-même, pour nous, les lecteurs. On s’abreuve donc à un dialogue parfois fougueux et toujours entrainant : « Je savais que, si je toffais, ma mère se tannerait de me surveiller sans arrêt. Je veux dire, elle pouvait plus coucher chez son chum ni souper au restaurant avec son amie de fille. C’est impossible qu’elle ne trouvait pas ça dull ».

La langue des jeunes et des mots de tous les jours du Saguenay, tiendrait à préciser Geneviève Pettersen, alias Madame Chose.  Si jamais « La déesse des mouches à feu » vous titille pour une lecture aux allures poétiques, oubliez ce roman qu’il faut apprécier pour un langage cru et "archi" québécois. C’est à prendre ou à laisser. Je l’ai pris et ne l’ai pas regretté, malgré quelques réticences aux premières pages. Il y a tant de rebondissements et de dynamisme que j'y ai trouvé amplement mon compte dans cette galerie de personnages jeunes qui cachent leur jeu aux adultes. Il faut un temps pour s’ajuster mais une fois que l’on syntonise clairement la voix, on vit l’intimité d’une adolescente qui n’a pas froid aux yeux et qui a du gros bon sens…. malgré tout ! 

Catherine, jeune fille qui a du caractère tout autant que cette histoire en a.

mardi 20 octobre 2015

Les chroniques d’une fille indigne 2 : Affreusement heureuse

Vous avez besoin d’une demi-heure de détente, de décrispation, d’éclats de sourire ? Ces chroniques de Caroline Allard sont pour vous. Encore plus, si vous aimez la jeunesse un peu insolente parce que très intelligente. Par contre, l’envers de la médaille, attendez-vous à éprouver une crispation au niveau de la mâchoire car vous n’aurez pas le temps de la laisser tomber assez longtemps que déjà un mot d’esprit vole et vous devrez de nouveau vous crispez de sourire. Un conseil : riez au lieu de sourire, il y aura moins de séquelles après la lecture.

Vous y trouverez exactement 145 anecdotes savoureuses illustrées. Donc, si les mots de l’auteure, qui les a volés de la bouche de sa fille ne vous font pas rire dans votre tête, ce n’est pas grave car Francis Desharnais vous fera rire de son crayon.

Il arrive que certaines situations ne vous fassent pas rire immédiatement, c’est possible, faut dire que parfois on s’entête, on se dit « non, c’est trop niais, il n’est pas question que je me remonte la commissure pour ça ! C’est votre droit le plus strict mais je vous avertis, qu’à la longue, il y en aura une encore plus niaise qui vous fera éclater. J’ai bien dit « éclater » puisque tout ce qui se retient, finit par éclater un jour et plus fortement que si le relâchement a prévalu. Mais c’est de vos affaires, je ne vous dirai certainement pas comment rire ce petit bouquin. C’est votre demi-heure et même plus, car vous avez le droit de lire plus lentement que je l’ai fait, cela peut être votre 45 minutes. Faites-en ce que vous voulez. Tant qu’à moi, vu que je vous ai au bout de la ligne, je vous confierai que j’ai été d’une gourmandise gargantuesque. Je les avalées vite, vite, je n’avais pas fini de la mastiquer, que dire de l’assimiler, que j’en voulais une autre, tout de suite il me fallait une sensation aigüe au niveau du plexus solaire. Je désirais continuellement qu’on me le chatouille, tu parles d’une affaire. J’ai pensé à l’effet d’une drogue, c’est ça, un genre de drogue douce.

Alors, attention, ma conscience exige que je vous avise que c’est à consommer avec modération, surtout que vous n’avez pas le choix, il n’y a que 145 anecdotes savoureuses. Donc, mettez la pédale douce. Autrement dit, ne faites pas comme moi (ni comme Marsi), n’avalez pas trop vite sans assimiler chaque case. Arrêtez-vous. Dans le milieu ou, au mieux, au quart. Tiens, consommez le tout en 4 fois. Vous aurez le temps d’y penser, d’y repenser, d’avoir hâte, de désirer, de fabuler. Tout ça est bon pour la santé.

Par contre, je vais être franche avec vous, vous ne soupçonnez pas une seconde combien ce que je vous demande va exiger de vous un effort. Attendez-vous à un énorme effort de rétention. Cette halte ne se fait pas facilement, cela équivaut à laisser tomber une drogue (même douce, c’est dur), avant qu’elle, ne vous laisse tomber.

Cette enfant issue de sa mère est de la plus épaisse mauvaise foi qui soit. N’importe quelle mère aurait donné sa démission mais voilà, une mère indigne, ça ne donne pas sa démission, ça encourage la mauvaise foi, surtout quand elle peut être drolatique. Je soupçonne cette mère d’être continuellement à l’affût d’une perle. De toutes manières, entre mère et fille, on s’échange la mauvaise foi comme les élastiques à cheveux. La grande sœur de fille indigne est un témoin silencieux sur laquelle nous pouvons projeter beaucoup. On se dit, pauvre enfant, avoir à supporter 365 jours par année une paire de femmes de mauvaise foi, une petite et une de plus grande taille. On pourrait aussi se dire que n’importe qui aurait l’air sage aux côtés de cette paire impayable. Rien à redire puisque c’est vrai.

Le père maintenant. Le père est peu présent et semble un genre de témoin à certains moments. De lui se dégage surtout l’odeur de l’être manipulé à souhait. Avec les mimiques qu’il nous offre, on sent que les relations à petites doses, et à sa fille indigne et à sa mère indigne a fini par l’affecter, probablement plus qu’il ne le pense. Le dessinateur, en professionnel du trait a su capter cette détresse devant ce quotidien qui se présente sans queue ni tête.
Encore un point, avant que je vous laisse aller quérir votre exemplaire, si jamais il vous arrive à une anecdote savoureuse de ne pas la rire et seulement la lire, un conseil, revenez au titre puisqu’il y en un a à chaque page. Peut-être comprendrez-vous mieux et laisserez-vous échapper un pet de rire. Ça se peut et ce n’est pas plus grave qu’il ne le faut, parce que ça sent bon.

Allez, je vous laisse aller le rire. Vous reviendrez m’en parler. J’aime entendre vos impressions et de n’importe quelle anecdote savoureuse, je suis preneuse.

jeudi 8 octobre 2015

3 romans pour 1 : Cent mètres - Concerto pour petite noyée - La malédiction

J’innove. Encore une fois, j’innove afin que ce point de rencontre qu’est Le Passe-Mot reste agréable pour moi. Et du coup, je l’espère, pour vous. Durant ma convalescence suite à mon opération, j’ai lu, mais peut-être pas d’un esprit aussi alerte qu’habituellement. Vous savez ce que font les médicaments pour la douleur ? Bon, c’est ça.

Donc, aujourd’hui, j’aborderai trois lectures dans le même billet. Mes commentaires en seront écourtés, c’est à voir comme un garde-fou pour éviter de tomber dans le n’importe quoi et, en plus, une manière d’avancer dans mes commentaires, avec une douzaine de romans en attente.

J’ai lu « Cent mètres » de Pierre Gagnon avec curiosité, l’auteur ayant écrit Mon vieux et moi qui a obtenu un considérable succès ici et en Europe. Je me souviens vaguement du récit, à part d’un homme qui veut prendre le temps de vivre. Le narrateur fait l’éloge de prendre la vie comme elle vient et le personnage le mets en pratique en s'offrant l’amour avec une jeune femme pas du tout de son âge. C’est assez commun, avouons-le. L’écriture est fluide, elle coule mais, je ne peux pas dire qu’elle est entrainante. Il n’est pas évident de mettre en scène la lenteur dans un écrit, c’est même dangereux de côtoyer la langueur. Le texte est parsemé d’extraits de Léo Ferré, c’est à prendre ou à laisser. Comme j’ai conscience de ne pas avoir fait mes devoirs correctement, je vous laisse sur une critique étayée de Christiane Dubreuil et celle de Paul-André Proulx plus complète que la mienne. Et à noter que ce roman est parmi les 5 titres québécois meilleur vendeur à la librairie Vaugeois.

J’ai retiré plus de plaisir avec « Concerto pour petite noyée » d’Annie Loiselle. Cette auteure a un style particulier, découvert récemment avec ce Papillons et ses femmes qui m’avaient conquise. Cette fois, Valentine, une pianiste de concert m’a laissé sur mon île. Je l’ai regardé agir sans arriver à m’emballer pour elle ou, à peine, un effleurement de temps à autre. Pourtant, cette femme souffre intensément et en silence. Je l’ai pourtant observée, tentant de mon mieux d’entendre sa musique. Une autre femme est en selle, une mal-née et mal-aimée d’une mère trop endeuillée pour accueillir la venue au monde de cette belle rousse. Il n’y a aucun espace dans son cœur pour ce deuxième rejeton qui, à ses yeux, a volé la place de la première. La douleur de ne pas être aimé serait le thème central de cette œuvre à la troisième personne. Autant le style de Papillons m’avait fasciné, autant cette fois, j’y suis restée assez froide. J'ai tenté bien entendu de comprendre pourquoi. Peut-être est-ce le caractère des femmes assez froid nullement réchauffé par l’emploi des « elle ». À moins que ce soit le trop grand flottement de la fin qui m’a déçue, j’attendais plus d’éclaircissements. Ceci dit, je serai la première à sauter sur la prochaine publication d’Annie Loiselle.

Le troisième titre sous ma lorgnette est La Malédiction de Louise Simard, tome 2. Vous avez bien lu, tome 2, moi qui ne vous ai jamais présenté le tome 1. C’est la raison principale de mon bref recensement. Je compte lire le tome 1, que j’ai finalement reçu et pour lequel je compte rédiger un recensement plus complet. Je tenais à lire Louise Simard, c’était une première. J’y ai reconnu une expérience indéniable de la narration historique. Je me suis immédiatement attachée au personnage principal, une femme forte et avant-gardiste, tellement que j’en ai oublié que nous étions au Québec en 1825. Cette femme d’affaires à la tête de sa petite entreprise de confection de lainages fonce et les hommes qui l’entourent n’ont qu’à bien se tenir. Beau cadeau pour moi qui habite cette région, l’action se déroule aux alentours de Sherbrooke, ce qui m’a immédiatement intéressée autant que charmée. Imaginez, entendre parler de Magog dans ses années-là ! Par contre, le lecteur doit se tenir sur ses gardes et ne pas oublier le titre « La Malédiction », les départs définitifs survenant sans crier gare. L’avantage d’avoir lu le tome 2 avant le 1 est que certains personnages vont ressusciter sous mes yeux …